États-Unis : activités économiques
Les services occupent plus des trois quarts des actifs, l'industrie 22 %, et l'agriculture 2 % seulement. Les États-Unis se situent parmi les trois premiers producteurs mondiaux dans de nombreux domaines : pétrole, gaz, charbon et électricité (mais le secteur énergétique est déficitaire en hydrocarbures) ; céréales (blé, maïs) et soja, fruits tropicaux, élevage ; cultures industrielles (coton, tabac) ; sidérurgie et métallurgie des non-ferreux (aluminium) ; construction automobile et aéronautique ; chimie et électronique. Mais la concurrence au niveau mondial apparaît de plus en plus vive, le solde de la balance commerciale est lourdement négatif et le déficit budgétaire s'est creusé. Surtout, l’économie américaine doit aujourd'hui surmonter une crise majeure – née en 2007 de la crise financière des subprimes (crédits immobiliers à risque) et qui, en 2008, s’est aggravée et étendue à toute l’économie mondiale –, qui a ébranlé des secteurs entiers (comme l'automobile) et s'est traduite par une forte hausse du chômage.
1. La maîtrise d'un espace immense
1.1. Les héritages des colonisations
Les Amérindiens, souvent très mobiles, ont laissé peu de traces matérielles de leur occupation du territoire, si ce n'est dans la toponymie (noms donnés aux États, aux rivières, aux montagnes…). Les Espagnols, davantage que les Français, ont développé des missions, des forts militaires (présidios) et des communautés marchandes (pueblos) dont l'influence peut encore se lire dans l'architecture ou le semis urbain des États de l'Ouest. Mais ce sont les schémas d'organisation spatiale élaborés dans le cadre de la colonisation anglo-saxonne, notamment le plan en damier (grid), qui se sont appliqués à l'ensemble du territoire.
1.2. Une appropriation planifiée
Dès 1784, la Fédération envisagea la colonisation des territoires du Nord-Ouest et détermina a priori le maillage administratif. Les futurs États ont été découpés selon les méridiens et les parallèles en circonscriptions (townships) de 6 miles (9,6 km) de côté, subdivisées en 36 sections de 1 mile carré (260 ha), avec des réajustements éventuels pour tenir compte de la particularité des milieux (relief, hydrographie). Le plan des cités fut établi selon un quadrillage identique, aussi bien symbole de l'emprise fédérale qu'élément d'homogénéisation. L'espace, ainsi standardisé, a été mis en conformité avec l'idéal démocratique d'une jeune république hostile aux idées de centralité et de hiérarchie. Transformé en bien marchand, il a pu satisfaire l'individualisme agraire, l'accès à la propriété, ainsi que la spéculation et les échanges fonciers.
1.3. Un espace organisé
L'État fédéral possède un tiers du territoire national, soit 3 millions de km2 (déserts, forêts, mines, parcs naturels, camps militaires), essentiellement dans l'Ouest, dont il détient environ 60 % des terres. Si son pouvoir peut se lire à travers l'étendue de son domaine, celui du « local » a une traduction géographique plus mouvante car flexible : il dépend, en effet, de multiples organes susceptibles d'être créés, démantelés ou réaménagés en fonction des besoins – et donc à l'instigation – des populations concernées.
À l'échelon inférieur, les 50 États, de superficies et de populations très variables, déterminent le fonctionnement et le degré d'autonomie des collectivités locales. Ils sont divisés, au total, en 3 042 comtés (également très variés, celui de Los Angeles ayant 9 millions d'habitants) qui peuvent comporter, au dernier échelon, des territoires « incorporés », ou municipalités (près de 37 000). Les comtés sont administrés par des conseils élus, qui fixent, collectent, redistribuent aux municipalités l'impôt foncier et assurent des services urbains dans les territoires non incorporés. Par pétition, des habitants peuvent demander de constituer une municipalité pour gérer leurs ressources et organiser leurs services. Cette démocratie locale et directe tend cependant à accentuer la ségrégation spatiale : peu désireux de payer pour d'autres des services dont ils n'auraient pas besoin, les habitants d'un espace incorporé choisissent ceux qu'ils acceptent de financer ainsi que les règles d'urbanisme et de vie qu'ils s'imposent et, par conséquent, la condition sociale, voire la dominance ethnique, de leur communauté. Enfin, les populations d'un territoire peuvent demander que soient créées des instances administratives et politiques, les districts, en vue d'assurer certains services particuliers (enseignement, santé, transports, approvisionnement en eau, etc.).
La propension des Américains à l'association avec leurs semblables et leur recherche d'une fonctionnalité optimale expliquent également le succès du zonage et la formation de communautés spatiales homogènes. D'où cet attachement aux lieux indépendemment de leur morphologie, puisque priment sur elle les sociabilités et les services particuliers qu'ils offrent, et qui se reproduisent à l'identique ailleurs, dans des communautés aux caractéristiques sociales similaires (neighborhoods). L'importance de ce cadre de vie « interchangeable » et « privatisé » va de pair avec le peu d'intérêt que les Américains accordent à l'espace public, désormais remplacé comme lieu de rencontres et d'échanges par l'espace commercial.
1.4. L'importance des transports
Premier pays au monde pour l'intensité des flux de voyageurs, de marchandises et de données immatérielles, les États-Unis dépensent chaque année l'équivalent du produit national brut du Royaume-Uni pour les transports. Le trafic des passagers est assuré à 80 % par l'automobile et à près de 20 % par l'avion. Les marchandises transitent à 37 % par le train, 28 % par la route, 15 % par les canaux et les fleuves, et 20 % par les conduites (pipelines).
Avec 6 millions de km de routes, dont 88 000 km d'autoroutes gratuites et une essence bon marché, l'automobile constitue le mode de déplacement privilégié des Américains. La pratique industrielle des flux tendus a, par ailleurs, favorisé l'essor du transport par camion.
Le rail a joué un rôle moteur dans la structuration de l'espace au xixe s., mais, peu modernisé, il a décliné après 1945. Il assure encore une bonne partie du trafic de pondéreux (minerais et céréales des Grandes Plaines acheminés jusqu'aux Grands Lacs et au Mississippi), qui transitent également par voie d'eau.
Le transport fluvial s'organise autour de deux grands axes : le système Hudson-Saint-Laurent-Grands Lacs et l'artère Ohio-Mississippi. Un réseau très complet de conduites a, en outre, été aménagé, à l'image de l'oléoduc de l'Alaska (1 300 km), mis en service en 1976, qui relie les gisements pétrolifères de Prudhoe Bay, dans le nord de l'Alaska, au port en eau libre de Valdez, et dont la construction en milieu périglaciaire et sismique fut une prouesse technique.
Les États-Unis, enfin, sont les premiers utilisateurs de conteneurs au monde : les ports de l'Ouest (Los Angeles-Long Beach, Seattle, Oakland) devancent, en ce domaine, ceux du Sud (Corpus Christi, Houston, La Nouvelle-Orléans-Baton Rouge, Mobile) et de l'Est (Baltimore, Philadelphie, New York), pourtant bien équipés.
Un tiers du trafic mondial, 17 500 aéroports dont les six premiers nœuds mondiaux : les États-Unis ont construit un réseau aérien exceptionnel. Avec la déréglementation, la concentration des compagnies et la rationalisation de leurs systèmes de gestion, de grands pôles aéroportuaires (hubs) sont apparus, interfaces privilégiées entre l'ensemble du territoire et le reste du monde, qui attirent toutes sortes d'activités (industries de haute technologie, services, centres de congrès) et contribuent au rayonnement national ou international des villes qui les abritent (Chicago, New York, Los Angeles, mais aussi Atlanta, Dallas, Pittsburgh, Minneapolis…).
À ces flux s'ajoutent ceux des biens immatériels : bien équipés, les ménages (près de la moitié disposent d'un ordinateur) et les entreprises sont reliés aux réseaux câblés et informatiques. Malgré la montée en puissance des villes du Sud (Atlanta) et de l'Ouest (Los Angeles), New York conserve sa prééminence dans l'information.
1.5. Un espace transformé, gaspillé et préservé
Cependant, la maîtrise de ce territoire immense ne s'est pas faite sans gaspillage spatial, énergétique ou écologique.
L'État fédéral a pris en charge l'approvisionnement en eau de l'Ouest aride et a aménagé réservoirs et bassins, comme celui du Colorado dont la répartition du débit est âprement débattue entre nations (Mexique, États-Unis), États (Californie, Arizona, Nevada…) et utilisateurs (les 2 % d'agriculteurs qui, à eux seuls, représentent 40 % des besoins, les industriels, les professionnels du tourisme et, enfin, les citadins, toujours plus nombreux). Les besoins croissants et l'épuisement (nappes d'eau souterraines) ou les limites des ressources utilisées impliquent à terme des réductions autoritaires de surfaces irriguées et font naître ou ressuscitent des projets prométhéens comme, au milieu des années 1960, le NAWAPA (North American Water Power Alliance) qui envisageait le détournement des eaux du Yukon canadien et de la Columbia jusqu'à la Californie et l'ouest du Texas.
L'abondance des ressources, la mentalité pionnière, le laisser-faire ont induit une conception consommatrice de l'espace – le colon allait plus loin quand la terre s'épuisait – qui ne s'est guère souciée de sa pollution ou de son saccage. De fait, l'espace a beaucoup souffert de son exploitation : salinisation des sols par une irrigation mal contrôlée (2 millions d'ha) et érosion des sols capable d'arracher des nuages de poussière d'une surface grande comme la France (Dust Bowl des années 1930), inondations dramatiques liées à la dénudation des terres et au ravinement des versants (cultures, coupes à blanc). Les produits phytosanitaires employés par l'agriculture ainsi que les effluents urbains et industriels continuent à polluer les eaux (nappes, lacs, rivières, littoraux).
La prise de conscience du caractère à la fois limité et fragile des ressources et des milieux est pourtant ancienne, comme en témoignent la naissance des parcs nationaux (Yellowstone en 1872, Yosemite en 1890, etc.), la création d'administrations spécifiques et la définition de grands travaux, comme la TVA (Tennessee Valley Authority) à l'époque du New Deal. Il a fallu, cependant, attendre les années 1960 et de nouvelles catastrophes écologiques pour que l'État fédéral se préoccupe davantage des questions d'environnement et élabore une politique anti-pollution (Clean Air Acts de 1963 et 1990, Clean Water Act de 1972, étude d'impact obligatoire, incitation des agriculteurs à l'emploi de pratiques culturales plus respectueuses des sols, etc.). Les résultats sont tangibles : des espèces menacées ont été sauvées, la qualité de l'air et de l'eau s'est améliorée. Les États-Unis figurent néanmoins toujours parmi les plus importants « pollueurs » de la planète.
2. La production de richesses
2.1. Tableau de l'économie
La crise économique et la dette sont sans précédent depuis les années 1930. L'endettement des ménages, qui a favorisé la croissance pendant plusieurs années, a entraîné une bulle immobilière qui a éclaté en 2008 : les emprunts gagés sur les hypothèques des biens immobiliers n'ont pas pu être couverts, d'où une crise de l'immobilier, dite crise du « subprime », qui a amené la saisie de 2,3 millions de logements en 2008. Cette crise de l'immobilier s'est doublée d'une crise financière, avec la faillite de plusieurs banques de renom. L'État fédéral a dû venir en aide au secteur financier en débloquant deux enveloppes de 350 milliards de dollars chacune, dont une partie devrait être utilisée pour aider les propriétaires en difficulté. Il s'en est suivi une crise économique qui a d'abord touché l'industrie, et principalement les constructeurs automobiles, puis le secteur des services. Entrée en récession, l'économie américaine a perdu 2,5 millions d'emplois en 2008 sur un total de 132 millions, un volume jamais vu depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, et le taux de chômage s'est élevé à 9,8 % en septembre 2009, soit le plus fort taux depuis 1983, alors qu'il n'était que de 4 % en 2000. Le nombre de personnes classées comme pauvres est passé de 31 millions en 2000 à 37 millions en 2007. Les inégalités se sont accrues : les 5 % des ménages les plus riches détiennent 21 % des revenus, alors les 20 % les plus pauvres ne disposent que de 3 % de ces revenus. La dette brute des États-Unis dépasse les 16 000 milliards de dollars, soit 103 % du produit intérieur brut, en 2012.
Les productions américaines sont de plus en plus concurrencées : 70 % d'entre elles le sont aujourd'hui, contre 5 % seulement en 1950. Le taux de pénétration étrangère se monte à plus de 40 % pour les biens de consommation. La part des États-Unis dans la production mondiale de richesses a été divisée par deux en cinquante ans, mais 5 % de la population planétaire assurent encore le quart de la richesse totale dans ce qui reste le plus grand marché intérieur du monde (d'autant que, depuis 1989, il s'est élargi au riche voisin canadien et, en 1994, dans le cadre de l'A.L.E.N.A., au Mexique frontalier) et le principal centre de l'innovation. Le pays draine les cerveaux du monde entier et sa base économique ne cesse de se renforcer dans la haute technologie et les services. Première puissance du monde, il ne compte plus que 2 % d'agriculteurs et 20 % d'actifs dans l'industrie, le tertiaire représentant, aujourd'hui, 7 % de la population active.
Les entreprises américaines, restructurées dans les années 1980 et 1990, font preuve d'une politique commerciale agressive, prenant l'ensemble de la planète pour terrain d'action. Elles sont appuyées dans cette démarche par le gouvernement fédéral qui n'hésite pas à intervenir pour leur garantir des débouchés importants. De fait, le pays a renforcé son rôle de pivot dans le commerce international. Ses multinationales dominent le palmarès des 500 plus grandes firmes mondiales et captent jusqu'à la moitié de leurs profits. Le chiffre d'affaires de l'une des premières d'entre elles, General Motors (GM), équivaut au produit national brut (P.N.B.) danois ! Le modèle américain, qui juxtapose toutes les cultures, se veut universel : à côté de sa langue, ses moyens d'information (la chaîne de télévision CNN), ses technologies (Internet), ses biens de consommation (Coca-Cola) ou encore ses services (McDonald's) en sont devenus les symboles.
Preuve de la confiance des marchés, l'économie américaine continue d'attirer les capitaux, demeurant le premier pôle émetteur et récepteur d'investissements (ceux des États-Unis dans le monde ont été multipliés par six en volume depuis 1970, ceux de l'étranger dans le pays par vingt). Le dollar (depuis les accords de Bretton Woods et malgré la fin de sa convertibilité en or en 1971) reste la monnaie de référence, New York et Chicago étant les principales places boursières et bancaires du monde (35 % de la capitalisation mondiale).
2.2. Une énorme production minière et énergétique
Les États-Unis disposent de ressources naturelles considérables : 10 % de la production pétrolière mondiale (3e rang), 22 % du gaz naturel (2e rang), 23,5 % de la houille (2e rang), 6,5 % du fer (7e rang), 13 % du cuivre (2e rang). Ils sont le premier producteur mondial d'hydrocarbures, pétrole et gaz mélangés, devant la Russie et l'Arabie saoudite. Ils figurent, également, parmi les premiers producteurs mondiaux de lignite, d'or, de plomb, de zinc et d'argent. Ils consomment, en outre, 30 % de l'électricité nucléaire produite dans le monde (1er rang) et plus généralement un quart de l'énergie mondiale.
Le pétrole extrait des gisements du golfe du Mexique (35 % de la production), de l'Oklahoma-Kansas (15 %) et de l'Alaska (25 %) ne suffit pas à une consommation énergétique prodigue, de l'ordre de 8 000 kep/hab. (kilos équivalent pétrole par habitant) : le pays dépend en effet de l'extérieur pour 40 % de ses besoins. Avec l'augmentation de la production de pétrole non conventionnel, le pays est de moins en moins dépendants des importations.
Les ressources du pays en gaz et pétrole de schiste sont considérables. Les États-Unis disposent des deuxièmes ressources exploitables de pétrole de schiste, derrière la Russie, et des quatrièmes ressources exploitables de gaz de schiste, derrière la Chine, l'Argentine et l'Algérie. Les principaux gisements se situent dans le bassin de Bakken, à cheval sur le Dakota du Nord et le Montana, au Texas, en Californie, dans le Colorado et dans l'Utah. La production de gaz et de pétrole de schiste est en pleine croissance : 20 % de la production de gaz provient de gaz de schiste. Cette croissance a entraîné une forte chute du prix du gaz naturel, ce qui contribue à la réindustrialisation du pays, notamment dans la chimie.
Les chocs pétroliers ont relancé l'exploitation des abondantes réserves de houille (évaluées à deux siècles de consommation). Les couches épaisses et peu profondes des mines à ciel ouvert de l'Overthrust Belt (Wyoming, Idaho, Utah) fournissent près de 45 % de la production, à peine moins que le vieux bassin minier des Appalaches, dont le charbon, de moins bonne qualité et plus coûteux, est proche des centres de consommation et des ports d'exportation (Hampton Roads). Les gisements situés au sud-ouest des Grands Lacs constituent un appoint non négligeable. L'avenir du charbon est, cependant, compromis par la législation anti-pollution. Sa proportion dans la production d'électricité a diminué de 50 % en 2009 à 39 % en 2012.
Les centrales nucléaires fournissent 20 % de la production totale d'électricité. Elles sont concentrées autour des Grands Lacs et sur la côte atlantique, où elles couvrent près du tiers de la consommation. Leur développement, arrêté après l'accident de Three Mile Island en 1979, est maintenant relancé.
L'hydroélectricité fournit 10 % des besoins (Tennessee, Colorado, Columbia). Une partie est importée du Canada, mieux équipé.
Par ailleurs, l'Ouest regorge de minerais : cuivre d'Arizona, or, uranium, plomb des Rocheuses, etc. Les gisements de fer sont exploités autour du lac Supérieur et dans le sud des Appalaches.
2.3. Les transformations de l'industrie
La réduction de la part des États-Unis dans la production industrielle mondiale (passée de 55 % à 20 % en quarante-cinq ans) et le paysage (ponctuel) de friches de la Manufacturing Belt nourrissent le thème de la désindustrialisation. Pourtant, la progression, en valeur, de la production américaine (+ 50 % depuis 1973) dément l'idée de déclin, et seules quelques branches ont connu une stagnation ou un recul. Certes, la part de l'industrie dans le produit intérieur brut (P.I.B.) est descendue à 22 %, mais il convient de nuancer ce chiffre par la croissance très rapide des services, ceux-ci prenant en charge, de surcroît, des activités relevant jadis du secteur secondaire (étude de marché, publicité, entretien, transport, etc., soit un tiers du secteur tertiaire). Au total, près de la moitié du P.I.B. demeure donc dans la mouvance de l'industrie. De même, la baisse de la part de l'emploi industriel, passée, en quarante ans, du tiers au cinquième de la population active, rapportée à l'augmentation de celle-ci, équivaut à un accroissement de 15 à 19 millions du nombre des travailleurs (même si 2 millions de postes ont disparu depuis le maximum des années 1970).
Bien campés sur un marché intérieur longtemps protégé, des secteurs ont néanmoins cédé devant la compétitivité et la capacité d'innovation d'une concurrence étrangère plus flexible, plus sensible à la diversité des marchés et mieux organisée industriellement. De fait, au cours des vingt-cinq dernières années, certaines activités, comme la métallurgie de base ainsi que des industries de main-d'œuvre produisant des biens intermédiaires (machinisme agricole, chantiers navals) ou de consommation (textile, cuir, électronique grand public) ont été sinistrées. À la fin des années 2000, ce sont les trois grands constructeurs automobiles de Detroit, General Motors, Chrysler et Ford, qui connaissent de graves difficultés : General Motors et Chrysler reçoivent en 2009 17,4 milliards de dollars de prêts de la part de l'État fédéral, ce qui leur évite un défaut de paiement. La construction de voitures particulières est passée de 6,4 millions en 1980 à 3,9 millions en 2007, ce qui menace 3 millions d'emplois directs et indirects.
Mais, dans le même temps, la haute technologie (aérospatiale, informatique, matériel électrique et électronique, pharmacie) a créé près de 6 millions d'emplois et sa croissance a entraîné, dans les entreprises, un surcroît de gains de productivité. 30 % de la croissance des années 1995-2000 sont dus aux innovations de la « nouvelle économie » et à ses effets d'entraînement sur les secteurs traditionnels.
Les États-Unis sont le deuxième exportateur mondial de produits de hautes technologies, avec 10 % des volumes.
De fait, depuis le début des années 1990, l'industrie américaine est redevenue très compétitive. L'accès facile aux capitaux, les liens étroits avec les centres universitaires, le soutien de l'État (marchés publics, recherche militaire, diplomatie commerciale), l'effort considérable en matière de recherche-développement, les économies d'échelle (marché intérieur), l'allongement de la durée du travail hebdomadaire dans les années 1980-1990 et la modération des coûts salariaux sont allés de pair avec la réorganisation de la production. À l'image des grandes firmes automobiles, diverses entreprises américaines ont noué des alliances avec les sociétés étrangères concurrentes et ont pu rattraper leur retard technologique. Elles ont aussi dégraissé leurs effectifs, délocalisé tout ou partie de leur production vers le sud et les pays en développement (notamment le Mexique), et se sont appuyées sur une sous-traitance de 17 millions de P.M.E. plus flexibles (qui assurent l'essentiel de la création d'emplois industriels). Ces changements témoignent donc moins d'un déclin que du passage d'un cycle à un autre, technologique et mondialisé.
2.4. Un nouvel espace industriel
Les restructurations ont bouleversé l'espace et le paysage industriels : le Nord-Est, de l'Atlantique aux Appalaches et aux Grands Lacs, a perdu plus de 2,5 millions d'emplois depuis 1970, tandis que les périphéries orientale et méridionale ont doublé leur part dans la production (de 25 à 45 %) et font désormais presque jeu égal avec l'ancien centre industriel du pays.
Le recul de la Manufacturing Belt résulte de la crise subie par les branches traditionnelles : sidérurgie, mécanique, machinisme, automobile. Près du tiers des emplois industriels a disparu dans les États allant de l'Illinois à la Pennsylvanie. Usines fermées et quartiers à l'abandon ont nourri l'image d'une ceinture de la rouille (Rust Belt), qui ne vaut à présent que pour des petites villes mono-industrielles de la région des Grands Lacs et certains quartiers des grandes métropoles. Il semble que la crise, rééquilibrage d'une position anormalement dominante au profit des autres régions, soit terminée : non seulement les technologies ont permis la modernisation de certains secteurs (aciers spéciaux, chimie, textiles synthétiques, automobile), mais encore des villes et des régions sinistrées, comme Pittsburgh, le cœur de la sidérurgie américaine, ou la Nouvelle-Angleterre, ancienne région textile, se sont fort bien reconverties dans les industries de pointe, grâce à la valorisation de nombreux atouts : un énorme marché, des universités prestigieuses, un potentiel touristique très favorable, un environnement urbain et côtier exceptionnel.
Un espace industriel neuf, une réglementation plus favorable en matière de fiscalité ou de pollution, une syndicalisation très faible ainsi que des salaires peu élevés ont entraîné l'industrialisation du Sud. La recherche de nouvelles conditions de travail a en effet conduit les entrepreneurs à privilégier une main-d'œuvre plus flexible que celle du Nord. L'évolution technologique, la miniaturisation et les progrès des transports (autoroutes, avion) ont favorisé l'essaimage de petits ateliers d'assemblage plus souples que les grandes unités septentrionales. L'énumération des secteurs qui ont ainsi investi dans le Sud ces trente dernières années (textile, chimie, automobile – dont des unités japonaises et allemandes –, pneumatique, mécanique) indique un prolongement méridional de la Manufacturing Belt, lié à la réorganisation de sa production.
L'Ouest, du Texas à l'État de Washington, est spécialisé dans les industries de haute technologie. La Californie a aspiré le quart des emplois nouveaux créés dans ce secteur depuis 1972, part qui atteint 60 % pour l'ensemble de la Sun Belt. Des technopoles situées à proximité des universités ont constitué le terreau de P.M.E. dynamiques, comme la Silicon Valley, près de Stanford. Elles se sont, par la suite, multipliées à l'échelle du pays (Silicon Prairie de Dallas à Austin, Route 128 à Boston, Beltway de Washington DC, Silicon Oval à Detroit, Triangle Research Park en Caroline du Nord, etc.) et tendent, depuis les années 1980, à se déconcentrer, par exemple de San Francisco vers Monterey, Sacramento, voire l'Oregon et l'Utah, ou encore de Los Angeles vers Palm Springs et l'Arizona, etc.
Enfin, la mondialisation rend désormais ambiguë la notion d'espace industriel national. Ainsi, 20 % des importations correspondent à des biens américains fabriqués à l'étranger. De plus, un demi-million de Mexicains assemblent dans les maquiladoras, ateliers frontaliers, des composants produits aux États-Unis, puis réexpédiés finis (automobiles, électronique, informatique, textile) sur le marché américain.
2.5. Puissance et diversification du complexe agro-industriel
L'agriculture américaine (2 % des actifs) collectionne, elle aussi, les performances : un potentiel foncier considérable (la surface cultivée, de 245 millions d'ha contre 88 millions pour l'Europe, peut être aisément doublée), un éventail complet de produits, 25 % de la production destinés à l'exportation, 15 % du marché mondial, le 1er rang mondial pour le maïs et le soja, le 3e pour le coton, le blé et les agrumes, le 4e pour le tabac, l'arachide, le sucre et les pommes de terre. Elle est en outre le 4e producteur de vin, et dispose du 2e cheptel porcin et du 5e cheptel bovin. C'est, au total, la plus puissante agriculture du monde. Développé vers l'amont (recherche agronomique, engrais, produits phytosanitaires, machinisme agricole) et l'aval (agroalimentaire), un puissant complexe agro-industriel forme la première filière du pays avec 18 % du P.I.B. et 9 % des actifs, et dispose de moyens énormes, d'où une augmentation constante de la productivité mais aussi des rendements.
Le revers est la dépendance à l'égard des marchés. Dans les années 1980, l'effondrement des cours a mené à la faillite un certain nombre d'agriculteurs qui avaient massivement investi lors de la décennie précédente pour répondre à l'essor de la demande suscité par les achats soviétiques. Beaucoup de fermes familiales ont ainsi disparu au profit de vastes domaines constitués en sociétés anonymes (les corporate farms, de plus de 800 ha, représentent 3 % des 2 millions d'exploitations mais près de 50 % de la superficie agricole), et ce malgré l'intervention du gouvernement qui a mis en œuvre des programmes de gel compensé des terres et qui a garanti les prix en échange d'une limitation des superficies.
Autrefois organisée en ceintures de productions spécialisées (Wheat Belt du Dakota du Nord au Kansas, Dairy Belt du Wisconsin à la Pennsylvanie, Cotton Belt de la Virginie au Texas), l'agriculture industrialisée s'est libérée des contraintes naturelles des régions. Les Belts se sont diversifiées :
– Le Nord-Est offre toujours des productions à forte valeur ajoutée (maraîchages, serres) pour supporter le prix élevé des sols lié à la pression foncière des villes, vers lesquelles il écoule viande, lait, légumes et fruits.
– Le Sud-Est (Virginie, Carolines, Kentucky) a abandonné aux grands domaines irrigués de l'Ouest la culture du coton qui a appauvri les sols et les métayers noirs. Il a connu un renouveau grâce, dans un premier temps, au tabac, qui est aujourd'hui de plus en plus marginalisé, et, plus récemment, grâce à la production de viande (porcs, poulets) fondée sur des cultures de maïs et de soja.
– Riz et canne à sucre poussent en bordure du golfe du Mexique, légumes et agrumes sont cultivés en Floride.
– Au nord des Grandes Plaines, la zone d'élevage laitier se contracte. De l'Indiana au Nebraska, l'ancienne Corn Belt associe désormais au maïs la culture du soja et l'élevage porcin. À l'ouest du 100e méridien, ou « ligne des catastrophes » (sécheresse, érosion des sols), l'exploitation intensive de la nappe de l'Ogallala a permis l'irrigation par aspersion sur pivots géants (700 000 parcelles circulaires), remplaçant le dry-farming et la jachère bisannuelle. Le blé (blé d'hiver au nord, blé de printemps au sud) partage son ancien domaine avec les légumes de plein champ, le lin, le tournesol et l'orge.
– Dans les Rocheuses et leur piémont semi-aride (les Hautes Plaines), l'élevage extensif (ranching) fournit des bêtes pour les parcs d'engraissement (feed-lots pouvant contenir jusqu'à 100 000 têtes de bétail) des Grandes Plaines et des abords des métropoles. De puissantes entreprises produisent du blé et des pommes de terre sur le plateau irrigué de la Columbia dans le Nord-Ouest, tandis que plus près des côtes une petite agriculture fournit lait et fruits rouges.
– La Californie, avec ses riches terres irriguées de la Grande Vallée, est le premier État agricole du pays. Très performante, elle propose une gamme complète de productions, des fruits aux légumes, des grandes cultures (coton, maïs, luzerne) aux vignobles, sans oublier l'élevage hors-sol.
Les États-Unis sont le premier producteur mondial de bois. L'activité forestière domine dans le Nord-Ouest pacifique et, du fait des incitations au reboisement des terrains aux sols épuisés, dans le Sud-Est. La pêche (7e rang mondial) se déploie essentiellement sur le golfe du Mexique et sur la façade nord-ouest du Pacifique. La pisciculture est pratiquée à l'intérieur de ces régions littorales, notamment sur la Columbia, la Snake et dans les bayous du Mississippi.
2.6. Un tertiaire dominant
Les États-Unis sont devenus la première puissance postindustrielle du monde : le secteur tertiaire occupe 78 % des actifs et absorbe depuis trente ans 95 % des créations d'emplois (40 millions). Les services aux particuliers (commerce, restauration, hôtellerie, travaux domestiques, tourisme, loisirs, santé, sécurité) connaissent un prodigieux essor lié à l'amélioration du niveau de vie, à l'urbanisation, à l'allongement de la durée de travail hebdomadaire et au travail des femmes ; les services aux entreprises (ingénierie, conseil juridique, marketing, publicité, entretien, gardiennage), les métiers de la finance et de la communication se sont multipliés et/ou diversifiés. Seuls les services sociaux et administratifs plafonnent, depuis vingt-cinq ans, au quart de la population active totale. Contribuant pour 77 % au P.I.B., les services sont globalement moins productifs que l'industrie. De très nombreuses petites unités coexistent avec de grands groupes qui dominent, en particulier, dans les secteurs des télécommunications et des transports. Bénéficiant de l'engouement boursier pour les sociétés issues de l'Internet, des compagnies géantes ont vu le jour dans le domaine des médias : AOL a ainsi pris le contrôle du géant Time-Warner pour donner naissance au plus grand conglomérat de la branche. Les conditions de travail sont fortement polarisées : à côté des emplois de conception de haut niveau et de très forte productivité (finance, conseil juridique, ingénierie), on compte par millions les tâches d'exécution mal payées, très féminisées, souvent à temps partiel, à grande rotation de main-d'œuvre, notamment dans le secteur de la restauration, qui emploie, à lui seul, un sixième de la population active.
L'internationalisation progresse avec des sociétés mondialement connues comme McDonald's, Walt Disney, Hilton ou American Express. Les États-Unis sont devenus les premiers exportateurs mondiaux de services et les premiers bénéficiaires de recettes touristiques. Dans le secteur des communications, en plein essor, ils contrôlent le tiers du marché planétaire. Au reste, le cinéma constitue le deuxième produit d'exportation du pays. C'est pourquoi les gouvernements américains exercent dans le cadre des négociations internationales de fortes pressions pour faire tomber les entraves à leurs échanges (l'« exception culturelle », notamment).
2.7. Les États-Unis et le monde
Centre d'une économie qui se mondialise, les États-Unis s'ouvrent à l'extérieur : en trente ans, la part des exportations a doublé pour dépasser 8 % du P.N.B. (12,5 % des exportations mondiales). Biens et services destinés à l'étranger sont responsables du tiers de la croissance du P.I.B. au cours des dix dernières années. Mais les ventes de produits primaires et manufacturés sont loin de compenser les importations massives (11 % du P.I.B., 14,5 % du total mondial). En 1971, le pays connaît un premier déficit commercial, qui a considérablement augmenté à partir des années 1980. Son poids relatif devient préocupant. Il est en partie corrigé par la balance des services et par celle des revenus et placements, le solde étant financé, en définitive, par les flux d'investissements étrangers, directs (achats d'entreprises, de biens fonciers et immobiliers) ou financiers, au prix d'une perte d'indépendance qui ne saurait cependant remettre en cause la puissance de la machine économique du pays.
Le déficit commercial provient, pour les trois quarts, des échanges avec l'Asie, Japon en tête, et d'un petit nombre de secteurs : énergie, textile, chaussure, automobile, électronique grand public. La structure des exportations, partagées jusqu'au milieu des années 1980 entre matières premières (minières et agricoles) et biens hautement sophistiqués (avions et ordinateurs), s'est rééquilibrée au profit d'une gamme très variée de produits industriels. Les principaux partenaires commerciaux sont le Canada, le Japon, le Mexique (depuis peu), l'Allemagne et la Chine. Avec 40 % des échanges, l'Asie a dépassé l'Europe (25 %) dans les années 1980. D'où l'intérêt prioritaire accordé aux relations avec la zone Asie-Pacifique, ainsi qu'avec les deux pays frontaliers, le Mexique et le Canada. Les États-Unis s'appuient, notamment, sur l'APEC (Asian Pacific Economic Cooperation, créée en 1989 et relancée en 1993-1994) pour contrebalancer l'influence commerciale du Japon dans cette région, en particulier en Chine. L'A.L.E.N.A. (Accord de libre-échange nord-américain), entré en vigueur en 1994, a étendu au Mexique le traité signé avec le Canada depuis 1988 et crée un bloc nord-américain de 400 millions d'habitants.
3. Les sites des États-Unis classés à l'Unesco
Plusieurs sites des États-Unis sont inscrits sur la liste du patrimoine mondial de l'Unesco :
– Mesa Verde (parc national) ;
– New York : la statue de la Liberté ;
– Charlottesville : Monticello et Université de Virginie ;
– Porto Rico : la Fortaleza et le site historique national de San Juan ;
– la culture chaco ;
– Taos Pueblo ;
– Cahokia (site archéologique) ;
– Papahānaumokuākea ;
– Carlsbad (parc national des grottes) ;
– Grand Canyon (parc national) ;
– Great Smoky Mountains (parc national) ;
– Hawaii : parc national des volcans ;
– Independence Hall Kluane, Wrangell-St. Elias, Glacier Bay, Tatshenshini-Alsek (parcs nationaux) ;
– Mammoth Cave (parc national) ;
– Olympique (parc national) ;
– Redwood (parc d'État et parc national) ;
– Yellowstone (parc national) ;
– Yosemite (parc national) ;
– Waterton-Glacier (parc international de la paix) ;
– Everglades (parc national) (inscrit sur la liste du patrimoine en péril).
Pour en savoir plus, voir les articles géographie physique des États-Unis et population des États-Unis.