point chaud
Zone du manteau où se formerait du magma s'élevant en panache jusqu'à la surface terrestre en dehors des zones orogéniques.
Les points chauds ont été initialement définis comme des panaches de matière mantellique (en provenance du manteau) profonde et chaude, remontant en surface et perçant la lithosphère indépendamment de la configuration des plaques. On peut donc les trouver en position intraplaque, que ce soit sur de la lithosphère océanique (îles Hawaii, îles de la Société, les Comores, île de la Réunion, îles du Cap-Vert, les Canaries…) ou continentale (Yellowstone aux États-Unis, le massif du Hoggar en Algérie, les massifs du Cantal et du Mont-Dore en France…), ou bien à proximité des dorsales (Islande, Açores, Tristan da Cunha, île Amsterdam, île de Pâques, Galápagos…).
Le fonctionnement d'un point chaud
Classiquement, les points chauds sont considérés comme étant relativement immobiles par rapport à un système de référence fixe. En réalité, le panache issu de la couche D’’ (manteau) se déplace, mais elle peut être négligée à côté de la vitesse de la plaque lithosphérique subjacente. Ainsi, il est possible d'enregistrer le déplacement absolu (vitesse et direction) de la plaque océanique qui défile au-dessus d'un panache mantellique, suivant les images d'un chalumeau perçant une tôle ou de l'aiguille d'une machine à coudre piquant un tissu en mouvement : il en résulte un alignement d'îles, puis de monts sous-marins volcaniques (guyots) de plus en plus âgés, et de moins en moins élevés (subsidence) par rapport au plancher océanique originel, au fur et à mesure que l'on s'éloigne de la trace actuelle du panache mantellique.
L'exemple d'Hawaii
La meilleure illustration d'un point chaud intra océanique est fournie par l'alignement des îles constituant l'archipel Hawaii-Empereur, dont le volcanisme actif se trouve à l'extrémité sud-est, dans la grande île d'Hawaii, avec les volcans Mauna Loa et Kilauea. Depuis cette dernière île, la plus récente, on peut suivre la trace de l'alignement sur près de 6 000 km, d'abord selon une direction nord-ouest, puis, après un coude âgé de 43 millions d'années, suivant une direction nord pour former l'alignement des monts sous-marins de l'Empereur, dont le chaînon le plus ancien (75 millions d'années), et le plus profond, se trouve devant la fosse des Aléoutiennes. Le coude vieux de 43 millions d'années marque en fait le changement du mouvement de la plaque Pacifique à cette époque.
Différents points chauds
Un point chaud suscite, par intumescence thermique, un bombement généralisé de la croûte dont le diamètre peut mesurer plusieurs centaines, voire un millier de kilomètres. Un point chaud puissant peut amener le rift (fossé d'effondrement) à l'émersion sur une assez grande largeur, comme aux Afars. Il est possible que l'expansion océanique des dorsales soit facilitée par la présence d'un point chaud, qui peut, par ailleurs, conduire à la formation de rides sous-marines (dites rides asismiques) se propageant de part et d'autre de l'axe de la dorsale, convoyées par l'expansion de la croûte océanique normale : c'est le cas, dans l'Atlantique Sud, de la paire de rides de Walvis (est) et du Rio Grande (ouest).
Cette notion classique de point chaud doit être probablement nuancée. En effet, la relative fixité des points chauds et la variation régulière de l'âge des édifices volcaniques en fonction de la vitesse de déplacement de la plaque sus-jacente ne sont pas toujours vérifiées. Il semblerait qu'il existe une distinction entre des panaches puissants, stables (d'une durée pouvant atteindre 100 à 200 millions d'années) et d'origine profonde, et des points chauds plus ou moins bien définis, moins puissants, d'une durée de fonctionnement plus courte (n'excédant pas quelques millions d'années), plus superficiels et que l'on peut penser liés à des zones de faiblesse de la lithosphère.
L'origine des points chauds
Pour les panaches du premier type (Hawaii, Islande), on estime qu'ils prennent naissance, peut-être à la limite de l'asthénosphère et du manteau inférieur, vers 700 km, mais plus probablement à la limite du noyau et du manteau, c'est-à-dire dans la couche D’’. La remontée du panache s'effectuerait à une vitesse d'un ordre de grandeur plus élevé que celle des plaques ou des cellules de convection qui leur sont associées, soit quelques dizaines de centimètres par an.
La couche D’’ étant fluctuante et thermiquement instable, le panache permet d'évacuer rapidement l'excédent de chaleur accumulée. Le phénomène de couplage thermique noyau et couche D’’ a été mis en relation avec le mécanisme d'inversion du champ magnétique terrestre (paléomagnétisme). Certains auteurs admettent qu'à un intervalle anormalement long de polarité normale (comme celle du champ actuel) correspond un fonctionnement en surrégime des panaches. Ainsi au crétacé se sont produits, pendant le très long intervalle de calme magnétique (sans inversions) de 41 millions d'années (entre − 125 et − 84 millions d'années), d'énormes épanchements de basaltes sous-marins, notamment dans le Pacifique, formant ce que l'on appelle des « plateaux océaniques », dont le plus volumineux est celui d'Ontong Java, au nord de l'archipel des îles Salomon, avec une production de 50 millions de kilomètres cubes de laves.
Les trapps du Deccan
Un autre épanchement, mais continental celui-là, s'est déroulé vers – 65 millions d'années, à la limite du crétacé et du tertiaire, qui a vu la disparition des dinosaures. Il est à l'origine des trapps basaltiques du Deccan, en Inde occidentale, occupant une surface de 1,5 million de kilomètres carrés (volume de 2 millions de kilomètres cubes). Cet événement, qui a duré 1 à 2 millions d'années, a été engendré par le point chaud de la Réunion (actuellement sous l'île du même nom) lors de la phase de « rifting » (rupture de la croûte continentale) qui a préludé à la séparation du microcontinent des Seychelles d'avec l'Inde, un peu avant que cette dernière n'entre en contact avec l'Eurasie.
Le nombre de points chauds
Une autre hypothèse, très conjecturale, propose de lier l'origine des points chauds actuels à l'existence du supercontinent Pangée, qui aurait constitué un vaste bouclier thermique lithosphérique sous lequel se serait accumulée en certains points, et sans pouvoir s'en échapper, la chaleur du manteau, ce qui aurait conduit, à terme, à sa dislocation il y a environ 200 millions d'années.
Devant les difficultés à bien définir la notion de point chaud et la trace que certains sont censés avoir formée, l'estimation du nombre de points chauds varie suivant les auteurs : de 16 à 122 unités, mais l'estimation la plus communément admise avoisine la quarantaine