adaptation
(latin médiéval adaptatio)
Changement (morphologique, physiologique ou comportemental) survenu chez un individu animal ou végétal, à une lignée ou à une espèce, et qui augmente leurs chances de survie et de reproduction dans le milieu où ils vivent ; résultat de ce changement.
BIOLOGIE
L'adaptation est un phénomène essentiel chez les êtres vivants, un élément majeur de l'évolution des espèces. Lorsque leur environnement change, seuls peuvent survivre et se maintenir ceux qui possèdent – ou développent – les caractéristiques morphologiques, physiologiques ou comportementales adéquates, qui leur permettent d’utiliser les ressources de leur milieu, de se reproduire, de se défendre contre leurs prédateurs, de se protéger des aléas climatiques et de toute autre condition néfaste. L’adaptation se fait toujours par rapport à un milieu, à des conditions environnementales données.
1. Les caractères adaptatifs
On définit comme caractères adaptatifs les traits favorables à la survie et à la reproduction dans un milieu donné. Ces caractères concourent à une utilisation optimale des ressources et à une protection efficace contre les facteurs défavorables.
1.1. Les adaptations morphologiques
Les plus spectaculaires s'observent dans les milieux où les contraintes écologiques sont extrêmes. En milieu aride (→ désert), certaines plantes possèdent des tissus accumulateurs d'eau, situés dans la tige ou les feuilles (d'où leur aspect charnu) ; elles sont également recouvertes d'une cuticule cireuse, limitant les pertes d'eau par transpiration.
Dans les régions polaires (Arctique, Antarctique), l'adaptation conduit à une morphologie compacte des animaux, limitant la surface corporelle en contact avec l'extérieur.
Le camouflage est également un exemple d’adaptation au milieu : livrée beige ou mouchetée pour les animaux vivant au sol (lézards des sables, tétras femelle, serpent fer-de-lance...), motifs imitant l’environnement pour les animaux vivant parmi la végétation (phasmes, caméléons...), sur l’écorce des arbres (phalènes papillon), sur les fonds marins (poissons-pierres, poissons plats, limaces de mer...), etc.
À l’inverse du camouflage, certaines espèces arborent des motifs très visibles destinés à décourager leurs prédateurs, comme ces papillons (par exemple le paon de jour ou le grand paon de nuit) dont les ailes sont ornées de grands motifs circulaires (les ocelles) évoquant des yeux d’oiseaux.
Le mimétisme fournit de nombreux exemples d’adaptations morphologiques : de nombreuses espèces (insectes, papillons, grenouilles, serpents...), arborent les couleurs vives signalant aux yeux des prédateurs une espèce toxique, alors qu’elles ne présentent aucun danger ; certains animaux se « déguisent » en d’autres (ainsi le faux-corail, une couleuvre du continent américain, arbore-t-elle des motifs imitant ceux du serpent corail, un cousin du cobra, également venimeux), certaines mouches parfaitement inoffensives ont l’allure de guêpes, etc. La pratique du mimétisme concerne aussi les plantes : la fleur des orchidées Ophrys, par exemple, mime l’abdomen d’une abeille femelle, attirant ainsi les mâles qui favorisent ainsi la pollinisation.
1.2. Les adaptations physiologiques
Elles correspondent à des modifications de certaines fonctions ou de l' activité métabolique générale des organismes.
Par exemple, dans les milieux arides, les animaux présentent des adaptations leur permettant d’économiser l’eau (sudation réduite, urine très concentrée, excréments secs) voire de se passer de boire, se contentant de l’eau contenue dans les aliments (les gerboises ou la gazelle dorcas peuvent se passer de boire pendant de longues périodes). Certaines espèces fabriquent de l’eau par oxydation des graisses de réserve comme celles stockées dans la bosse du dromadaire, par exemple (réserves nutritives).
Pour les animaux vivant en eau douce, l'essentiel de l'adaptation réside dans une double régulation : limiter l'entrée d'eau dans l'organisme et compenser la perte des substances dissoutes. Dans les milieux salins, on trouve des plantes – dites halophytes – capables de résister une teneur en sel trop élevée grâce à divers processus permettant de concentrer et d’éliminer le sel (glandes à sel, poils à sel, mort des feuilles chargées de sel, etc.).
Le ralentissement des fonctions physiologiques pour résister au froid (hibernation) ou à la sécheresse (estivation) est un autre exemple.
Certaines adaptations physiologiques peuvent être ponctuelles : c’est le cas chez certains acacias d’Afrique, qui se mettent à produire de grandes quantités de tanins, éloignant (voire tuant) les antilopes, dans les zones où ces dernières sont trop nombreuses et la pression exercée sur les arbres par ces herbivores trop forte. Les acacias agressés émettent même une molécule volatile qui entraîne la production de tanins par les arbres voisins.
1.3. Les adaptations comportementales
Les adaptations morphologiques et physiologiques constituent des stratégies de tolérance aux facteurs environnants. Elles agissent comme des processus régulateurs. Une autre stratégie consiste à éviter les contraintes par adaptation du cycle de vie ou du comportement. Nombre de ces adaptations permettent aux animaux de faire face à des fluctuations journalières ou saisonnières importantes des conditions du milieu. Pour y parvenir, ils tirent profit des facteurs favorables dans leur environnement.
Les oiseaux de régions froides construisent, par exemple, des nids exposés à l'est, bénéficiant de l'ensoleillement matinal. Dans les zones désertiques, de nombreux animaux sont nocturnes, évitant ainsi la forte chaleur de la journée. La migration permet aux animaux qui la pratiquent (des oiseaux surtout) d’éviter la saison froide ou sèche en allant passer les mois correspondants dans une région au climat plus accueillant.
D'autres comportements, telle la prédation, constituent des réponses adaptatives à des facteurs biotiques (liés au vivant). C'est le cas chez les poissons vivant en banc, qui tirent profit de l'effet de groupe pour désorienter leurs prédateurs.
Les cris d’alerte des singes vervets sont différents selon le prédateur, aigle, python ou léopard. Les termites ont installé l’air conditionné dans leurs termitières. Les suricates d’Afrique ont des guetteurs, chargés de prévenir la colonie en cas de danger.
2. Adaptation et évolution
Dès le xixe s., des naturalistes, Alphonse de Candolle, Charles Darwin et Alfred Russel Wallace notamment, avaient constaté que des espèces différentes soumises à des conditions écologiques semblables tendaient, au terme d'évolutions parallèles, à présenter des caractéristiques communes. Les cactées du continent américain et les euphorbes africaines montrent, par exemple, des morphologies semblables dans des conditions désertiques très voisines. Ce phénomène de convergence évolutive, qui concerne souvent un ensemble caractéristique (habitat, ressources alimentaires, comportement, etc.), montre le rôle déterminant des facteurs écologiques dans l'évolution.
Les conditions abiotiques du milieu (biotope) représentent le principal facteur responsable des adaptations des individus et des peuplements, mais les interactions entre êtres vivants jouent également un rôle dans l'évolution. La compétition entre espèces voisines coexistant dans un même biotope est susceptible de conduire à des modifications de leur morphologie, de leur physiologie ou de leur écologie. Ces évolutions leur permettent d'exploiter les ressources du milieu de façon différente et de réduire l'intensité de la compétition. À une diversification des niches écologiques, c'est-à-dire des modes de vie, s'associe une diversification des formes au sein des espèces, ce qui peut conduire à la création de sous-espèces ou d'espèces nouvelles isolées les unes des autres.
L'invasion d'un milieu lorsqu'il n'existe pas de compétiteurs potentiels, ou qu'il n'en existe que peu, est toujours suivie d'une évolution rapide des espèces, se traduisant par une diversification des adaptations. Ce phénomène de radiation adaptative est bien connu pour les milieux insulaires (île).
Il arrive que certaines adaptations soient ultérieurement utilisées pour un autre usage : c’est que l’on appelle l’exaptation (terme introduit par les scientifiques américains Stephen J. Gould et Elizabeth Vrba). C’est par exemple le cas des plumes des oiseaux, tout d’abord apparues chez les dinosaures dans un rôle de régulation de la température, puis mises à profit pour favoriser le vol.
→ évolution.