sculpture

(latin sculptura)

Sculpture en marbre
Sculpture en marbre

Art de sculpter.

La sculpture, sur pierre, sur bois, en terre cuite, en matières diverses comme le bronze ou l'ivoire, compte parmi les plus anciens des arts. Sa destination a d'abord été essentiellement religieuse, monumentale ou décorative. La sculpture profane ou à des fins purement esthétiques n'est apparue quant à elle que dans la Grèce hellénistique. Elle s'est surtout développée dans les Temps modernes, où elle est devenue prépondérante.

1. Techniques

1.1. Types de sculptures

Parmi les types de reliefs existant, on distingue tout d’abord la sculpture en ronde bosse. Entièrement dégagée (c'est-à-dire indépendante de tout fond), celle-ci est travaillée sur toutes ses faces visibles. Les sculptures en haut relief, demi-relief, ou bas relief, sont quant à elles plus ou moins engagée dans un fond.

Parmi les types d’œuvres la statuaire monumentale (statue isolée ou groupe) se distingue pour sa part de la sculpture d'ornements.

L'œuvre sculptée est obtenue soit par l'intermédiaire du modelage (suivi d'un moulage et d'une exécution en bronze, en pierre, etc.), soit par taille directe sur marbre, pierre, bois – procédés auxquels s'ajoute, depuis le xxe s., l'assemblage de matériaux divers.

1.2. Modelage et moulage

Pour modeler une œuvre, on utilise l'argile, ou terre glaise, la cire ou des pâtes à modeler. On a aussi recours au plâtre, étendu d'eau et battu de façon à former une pâte. Afin d'examiner son ouvrage sous ses différents profils, l'artiste se sert de la selle. Sur le plateau, tournant, de celle-ci, il fixe une tige en fer à laquelle il attachera une série de fils métalliques constituant l'armature, c'est-à-dire la charpente dont dépendront l'aplomb et l'assise de la sculpture. Les outils du modeleur sont l'ébauchoir et la mirette, mais il arrive qu'il se serve principalement de son pouce.

À la fin de chaque séance de travail, l'ébauche en terre glaise doit être revêtue de linges humides, pour éviter qu'elle ne sèche et durcisse. L'usage de pâtes qui ne sèchent pas dispense de cette précaution. L'artiste fait ensuite appel à un mouleur, qui exécute, par moulage, un modèle généralement en plâtre, qui servira de référence pour la taille sur marbre ou sur pierre.

Pour le bronze, l'artiste s'en remet d'ordinaire à un autre artisan, le fondeur, qui, à partir du modèle, établit un moule pour la fonte, au sable ou à « creux perdu ». Les retouches du bronze (son « réparage »), généralement exécutées par le fondeur, peuvent l'être par le sculpteur lui-même. Enfin, la pièce reçoit une patine, à l'aide d'acides plus ou moins chauffés, qui peut être bleue, verte, marron, noire ou dorée.

Pour la terre cuite, on exécute sur le plâtre un nouveau moule, le « moule à pièces », où l'on estampe la terre, que l'on laisse sécher avant de la mettre à cuire dans des fours spéciaux ; enfin, l'œuvre est patinée.

1.3. Taille sur pierre

Pour la sculpture sur pierre et marbre, l'antique méthode est la taille directe, abandonnée au xixe s., mais qui a connu au xxe s. un regain de faveur. L'autre méthode, inventée par les Grecs de l'époque hellénistique, est la mise aux points d'après le modèle initial (en plâtre ou autre matériau). On fait appel à un artisan qualifié, le metteur aux points, ou praticien. Celui-ci reproduit scrupuleusement le modèle à l'aide d'une machine à mettre aux points, pour un buste ou une statuette, ou de trois compas, pour une œuvre plus importante ; à partir de points de repère judicieusement répartis sur le modèle, il utilise le compas de proportions et le compas à branches courbes pour reporter les volumes. La sculpture, une fois dégrossie, est reprise, en principe par le sculpteur lui-même, à l'aide d'outils spéciaux : la masse, le ciseau, la pointe, la gradine et la râpe.

2. Histoire

2.1. La préhistoire

C’est dans l'Europe paléolithique que naît la sculpture. Opulentes statuettes féminines sculptées dans l'ivoire ou le calcaire (Vénus de Lespugue, Vénus de Willendorf), frises d'animaux modelées dans l'argile ou taillées en relief au sein de grottes-sanctuaires, objets en os ornés d'animaux étonnants de réalisme : toutes ces œuvres témoignent de la variété du langage plastique d'il y a quelque 30 000 ans.

2.2. L’Antiquité

Moyen-Orient

Mésopotamie

La grande sculpture se développe ensuite dans les civilisations du Moyen-Orient : du IVe au IIe millénaire, l'art babylonien et sumérien se développe en Mésopotamie, donnant naissance, sous le règne de Goudea, à des images d'un réalisme et d'une expressivité remarquables. Viennent ensuite les réalisations de l'art assyrien (ixe-viie s. avant J.-C.).

→ Mésopotamie : art et archéologie.

Égypte

Simultanément s’épanouit la sculpture égyptienne, de 2900 à 500 avant J.-C. Dès l'Ancien Empire, reliefs ou rondes-bosses atteignent à la perfection, tandis que se manifeste un premier souci d'individualisation. Travaillant généralement des pierres dures (granite, porphyre), le sculpteur égyptien représente ses figures frontalement : la tête dans l'axe du buste et les bras collés au tronc donnent à chaque personnage une dimension sacrée. Dans l’art du bas-relief les personnages sont quant à eux figurés de profil (stèle du Roi-Serpent, vers 2900 avant J.-C.). Cet art qui peut s'exprimer à travers de petites statuettes en bois, en céramique ou en pâte de verre sait aussi bien être colossal (sphinx de Gizeh, vers 2500 avant J.-C., près du Caire).

→ art de l'Égypte ancienne.

Monde méditerranéen

Des Cyclades à Mycènes

La Crète connaît ses premières sculptures avec l'art minoen (vers 2000 avant J.-C.) tandis que les îles grecques des Cyclades voient apparaître les idoles cycladiques, œuvres très stylisées figurant des êtres humains schématisés. Civilisations mycénienne et minoenne voient naître en outre des sculptures de deux types. D'une part, sont trouvés dans des tombeaux des objets d'une finesse sans égale, notamment plusieurs masques en or (vers 1500 avant J.-C.) d'un très fort réalisme. D'autre part, des tailleurs de pierre créent des œuvres monumentales, comme la porte des Lionnes, à Mycènes (vers 1300 avant J.-C.).

Grèce archaïque

Dans la Grèce archaïque (700-480 avant J.-C.), les sculpteurs se concentrent sur le thème du kouros (« jeune homme ») et de la korê (« jeune fille »). Après de premières œuvres à la composition géométrique et au modelé très rigide, le marbre s'anime peu à peu et les sujets gagnent en réalisme. La Korê au peplos (vers 530 avant J.-C.) figure l'expression achevée de ce style ; l'idéalisation des formes n'empêche pas la suggestion de détails anatomiques, et le visage s’anime du sourire dit archaïque. Dans la statuaire masculine le corps géométrique des deux athlètes Cléobis et Biton (vers 570 avant J.-C.) se transforme en une anatomie vivante.

Grèce classique
Statuaire

L'époque classique (500-323 avant J.-C.) est marquée par l'alliance harmonieuse de l'étude réaliste du corps et du souci d'idéalisation des formes. L'Aurige de Delphes (vers 475 avant J.-C.), est célèbre pour sa pose calme et sereine et le très léger mouvement de torsion de son torse. Cinquante ans plus tard, Polyclète avec le Doryphore (soldat portant une lance) invente un mouvement de déhanchement caractéristique. Simultanément, il rédige son fameux Canon, traité, aujourd'hui disparu, dans lequel il fonde la beauté sur des proportions mathématiques. À la même époque Myron crée le Discobole, œuvre illustre en raison de la figuration du mouvement qu'elle présente.

Au ive s., les sculpteurs exploitent les principes classiques, en les assouplissant. Praxitèle crée un modelé fluide et sensuel et renouvelle la sculpture féminine. Avec son Aphrodite de Cnide (vers 350), pour la première fois dans la sculpture grecque, le corps féminin est représenté dans sa nudité, et exhale une sensualité sans précédent.

Sculpture monumentale

Dans le domaine de la sculpture monumentale, l'aventure de l'art classique est liée à la décoration des temples. Des bas-reliefs ornent en particulier les frontons et révèlent un progrès continu. Les frontons du temple d'Aphaia à Égine (vers 500-480 avant J.-C.) ne sont encore composés que de figures indépendantes et juxtaposées. Ceux du temple de Zeus à Olympie (472-456 avant J.-C.), en revanche, comportent des personnages associés les uns aux autres par l'action et la composition. Phidias, par ailleurs créateur de statues colossales disparues en or et en ivoire (chryséléphantines) de Zeus et d’Athéna, laisse également la trace de son art dans les frises et les frontons du Parthénon (447-432 avant J.-C.).

Époque hellénistique

La période (323-100 avant J.-C.) est à la fois un temps de répétition du classicisme et d'invention sans précédent. Ainsi la Vénus de Milo (200-100 avant J.-C.), marbre frémissant de vie, constitue une reprise des créations classiques tandis qu’apparaissent des entreprises de figurations violentes ou pathétiques. Chef-d'œuvre monumental, l’autel de Zeus à Pergame (vers 180 avant J.-C.), frise en bas relief de 130 m de long, traite avec emphase et passion le thème de la gigantomachie, lutte épique des dieux et des Géants. Les personnages, représentés au paroxysme de leur effort, dans des mouvements impétueux, expriment tous les degrés de la souffrance, jusqu'à la mort. Ce style puissant et théâtral inspire le spectaculaire Laocoon (vers 100 avant J.-C.) qui fascinera des générations de sculpteurs, et notamment Michel-Ange, par l'énergie de son modelé.

→ art et architecture de la Grèce antique.

Sculpture étrusque et romaine

Les Romains, grands amateurs de sculpture, préfèrent généralement à la création la copie des chefs-d'œuvre grecs. On ne saurait cependant négliger leur apport à la sculpture mondiale par le sens de l'histoire qu'ils lui insufflent, non plus que l'importance de la tradition étrusque. Au cœur de celle-ci se signale la tradition du décor des sarcophages au moyen de grandes figures en terre cuite. Le sarcophage des Époux (vers 510) montre ainsi des visages précisément observés et présente une tendre image du couple humain. L'Apollon de Véies (vers 500) prouve, quant à lui, l'influence de l'art grec sur les artistes étrusques.

Le buste de Brutus (vers 250) atteste la qualité de travail du bronze à laquelle les Romains parviennent rapidement. L'intensité psychologique du portrait et la qualité de la ciselure ont une grande influence sur l'art du portrait, largement développé à Rome. Des œuvres en bas relief ornent en outre arcs de triomphe (arc de Constantin, 315) et colonnes (colonne Trajane, 106-113). Les statues équestres marquent également la période (statue équestre de l'empereur Marc Aurèle, 165).

2.3. La sculpture paléochrétienne et byzantine

Après le déplacement de la capitale de l'Empire romain de Rome à Constantinople (330), l'intérêt pour la sculpture décroît nettement. La grande sculpture en ronde bosse est associée à l'idolâtrie par les premiers chrétiens. En Occident, les traditions se perpétuent, mais la qualité générale décline. On remarque surtout de beaux sarcophages (sarcophage de sainte Constance, début du ive s.). À la recherche de nouvelles formes pour figurer la religion chrétienne, les sculpteurs font souvent dériver l'image du Christ de celle des dieux antiques (sarcophage de Junius Bassus, vers 359). Dans l'Empire byzantin, l'art officiel se réfugie principalement dans la miniature (Diptyque de Flavius Anastase, vers 517). L'art byzantin est également chrétien. On lui doit des œuvres d'une grande réussite formelle (bas-relief en ivoire du Christ couronnant Romain et Eudoxie, 950).

2.4. L'Europe médiévale

Renaissance carolingienne

Durant les temps obscurs du haut Moyen Âge, la sculpture connaît une grande éclipse. Elle commence à retrouver une importance réelle sous le règne de Charlemagne, participant du renouveau des esprits et des arts que l'on a appelé la « Renaissance carolingienne » (grilles de bronze de la chapelle Palatine à Aix-la-Chapelle).

La sculpture romane

Le début de la période romane, qui s’étend du début du xie à la fin du xiie s., correspond à la réapparition de la sculpture monumentale de pierre. Le linteau de l'église de Saint-Génis-des-Fontaines (1019-1020) est le véritable point de départ de la sculpture romane. Une de ses lois fondamentales est déjà respectée, celle de la primauté du cadre architectural : personnages et détails y sont strictement subordonnés. Le volume des corps est encore très schématiquement exprimé, et la sculpture demeure très proche d'un dessin en pierre. Le tympan semi-circulaire des églises, qui couronne le portail, devient un espace privilégié pour le déploiement des reliefs (tympan de l'église Saint-Pierre de Moissac, 1110-1120). Un des autres lieux investis par la sculpture est le chapiteau, entièrement réinventé par les tailleurs de pierre romans qui en font le support de figures monstrueuses, de scènes truculentes de la vie quotidienne, et surtout de représentations tirées de l'Ancien et du Nouveau Testament (église abbatiale de la Madeleine, Vézelay, 1130-1145).

→ art roman.

La sculpture gothique

France

Elle prend son essor au moment de la création du portail Royal de la cathédrale de Chartres (vers 1150). Ses « statues-colonnes », bien qu’empruntant leur forme d'ensemble à l'architecture, offrent aux regards des personnages démontrant un souci de réalisme entièrement nouveau, que l'on retrouve dans les visages, véritables portraits. Dès lors, les sculptures des portails des cathédrales de Senlis, de Sens, de Paris s'enchaînent et montrent un progrès continu dans la vérité du rendu et dans la figuration du relief. Les groupes de la Visitation (vers 1220) et de l'Annonciation (vers 1230) de la cathédrale de Chartres présentent des visages individualisés et diversifiés, et un souci d'expression propre au xiiie s.

Allemagne

En Allemagne, l'art gothique apparaît brusquement, vers 1230, dans la décoration de la cathédrale de Bamberg. Le Cavalier de Bamberg (1230-1240) est le premier groupe équestre de grande taille depuis l'Antiquité. La tête du capitaine présente des caractères nouveaux : son modelé brutal, sa construction solide créent un réalisme puissant et expressif, bien éloigné de la douceur de la sculpture d'Île-de-France. Cette recherche des formes dans leur singularité, ce désir de rendre des particularités de chaque individu est illustré avec éclat par le Maître de Naumburg, appellation conventionnelle donnée à l'artiste qui réalise le décor de cette cathédrale. Les visages d’Ekkehard et de son épouse Uta (vers 1260-1270, chœur occidental de la cathédrale de Naumburg) sont taillés avec une telle intensité, leurs traits sont si nettement marqués que l'on y lit de véritables portraits.

Italie

Seule l'Italie se constitue comme un terrain de résistance à l'expansion européenne de l'art gothique. De nombreuses régions y continuent la tradition romane, et la Toscane connaît avec Nicola Pisano une véritable révolution esthétique. Ce dernier rompt avec la tradition médiévale en créant une chaire hexagonale pour le baptistère de Pise. Il y renoue avec l'art antique en présentant des études de musculature nue qui prouvent une parfaite connaissance de l'anatomie. La chaire de la cathédrale de Sienne démontre quant à elle la parfaite intégration de la leçon gothique développée en Ile de France.

→ gothique.

2.5. La Renaissance

Le Quattrocento

Trois sculpteurs toscans inaugurent vers 1430 un monde nouveau dont le succès et l'importance sont considérables pour la civilisation occidentale. Le Siennois Jacopo della Quercia sculpte des reliefs pour le portail central de San Petronio à Bologne vers 1430 qui montrent un sens de la beauté du corps et du drame humain, fondé sur une composition claire et simple. Il a quelque temps auparavant participé au concours pour la deuxième Porte du Paradis du baptistère de Florence, où triomphe Lorenzo Ghiberti, dont la figuration de l'espace se rapproche des recherches des peintres qui inventent la perspective. Donatello est le seul à rénover la statuaire indépendante (David, vers 1440). Il réinvente également dans ses bustes l'art du portrait, ce qui lui vaut d'exécuter le monument funéraire en l'honneur du condottiere Gattamelata (1453, Padoue).

Michel-Ange et le maniérisme

Il revient à un artiste de la génération suivante de réaliser l'idéal de la sculpture à un degré de perfection tel que son nom est devenu le symbole même de cet art. Michel-Ange sera toute sa vie un homme passionné de volumes et d'expression, aussi bien comme tailleur de pierre que comme peintre. L'équilibre massif et la vigoureuse musculature de son colossal David (1501-1503) créent une impression de force et d'harmonie. L'artiste traite également des thèmes religieux (Pietà), mais son entreprise la plus importante demeure le tombeau du pape Jules II (Esclave mourant, 1515-1516). Il ouvre la voie au maniérisme dont l’un des plus illustres représentants est Benvenuto Cellini (Persée, 1554 ; Loggia dei Lanzi, Florence).

Renaissance française

Deux sculpteurs particulièrement inventifs marquent la période. Jean Goujon, dont les Nymphes (1548-1549) de la fontaine des Innocents, à Paris, présentent des figures suaves, au mouvement fluide et aux gestes gracieux, et Germain Pilon, auteur du tombeau de Catherine de Médicis et de Henri II, à Saint-Denis, et d'un Christ ressuscité dont la facture sinueuse toute maniériste n'enlève rien à la puissance réaliste.

→ Renaissance.

2.6. L'âge baroque

Italie

La sculpture baroque joue sur une confusion des genres, qui lui fait utiliser les ressources de l'architecture et de la peinture. Son représentant le plus marquant est le Bernin, qui excelle à figurer le mouvement et l'élan des figures (Apollon et Daphné, 1624). L’intérêt pour l'effet spectaculaire, cher à l’artiste, se retrouve également dans l'Extase de sainte Thérèse (1645-1647 ; église Santa Maria della Vittoria, Rome).

France

En France, les sculpteurs du xviie s. développent un art classique, éloigné de toute agitation pathétique. Mis à part Pierre Puget, dont les figures fortement expressives sont impressionnantes, les artistes créent des bustes réalistes, ou des œuvres décoratives, dont le plus bel ensemble, dans le parc de Versailles, rassemble, entre autres, des statues et des groupes de François Girardon et d'Antoine Coyzevox. Après les fastes du siècle de Louis XIV, Jean Antoine Houdon et Jean-Baptiste Pigalle se consacrent à un art élégant et gracieux, frémissant de vie et de sensualité. On a souvent, pour désigner ces recherches délicates, cet art de la surprise et de l'asymétrie, parlé de « rococo », notamment en art décoratif.

→ art baroque.

2.7. La sculpture néoclassique

Le néoclassicisme se révèle à partir des années 1750, en réaction à l'élégance jugée un peu mièvre du style rococo. Portés par une admiration illimitée pour l'art grec, et notamment pour la sculpture, les sculpteurs tentent de restaurer la grandeur de leur art. Leur maître à penser est l'archéologue allemand Winckelmann, qui, dans ses Réflexions sur l'imitation des œuvres d'art grecques dans la sculpture et la peinture (1755), invite les artistes à « imiter l'art grec pour devenir inimitables ». L'Italien Canova est le meilleur interprète de cette esthétique. Amour et Psyché (1793), d'une composition très élaborée, d'un raffinement sensuel marqué, montre un intérêt pour la beauté des corps juvéniles et une attention particulière au polissage du marbre, poussé à l'extrême. Ce courant se développe dans tous les pays européens, avec Bertel Thorvaldsen à Rome et au Danemark, John Flaxman en Angleterre, Hiram Powers et Horatio Greenough aux États-Unis. Le néoclassicisme sculptural se prolonge jusque vers 1850, sans évolution très marquée.

→ néoclassicisme.

2.8. À la recherche de l'expression

Parallèlement au courant néoclassique dominant, quelques artistes, fascinés par la quête de la vérité, essaient d'inventer des formes nouvelles. Auguste Préault met en scène la Tuerie (1834) dans un bas-relief tumultueux et puissant, d'une expression saisissante. Le caricaturiste Honoré Daumier sculpte quelques portraits charges, traités par masses synthétiques, et tout aussi impitoyables que ses dessins. L'animalier Antoine Louis Barye, pour lequel « rien n'est beau que le vrai », présente des animaux figurés sur le vif, dans un style aussi fougueux que les peintures de Delacroix. Jean-Baptiste Carpeaux assemble des groupes fluides et vivants, aux mouvements allègres (la Danse).

Auguste Rodin vient couronner les efforts de ce siècle, en imposant un style nouveau qui lui vaut un succès considérable (l'Âge d'airain). Toute sa vie, il travaille à la Porte de l'Enfer, qu'il laisse inachevée mais qui donne naissance à quantité d'œuvres, notamment le célèbre Penseur (1880), image de l'humanité anxieuse devant son destin. Les Océanides (1905), prévues pour le bas de la porte, montrent à quel point Rodin maîtrise l'art de transformer un bloc inerte de marbre en une matière rayonnant de sensualité et de force. Ses figures tordues de plaisir ou de douleur sont d'une expressivité que la sculpture avait rarement atteinte. Parallèlement, Rodin est un portraitiste mondain très prisé, et crée avec le Balzac (1898) une statue monumentale qui rend compte de la puissance de l'écrivain, mais suscite un scandale tel que la commande en sera annulée.

2.9. La sculpture depuis le début du xxe s.

La sculpture s’engage depuis le début du xxe s. dans des directions fort diverses. La sculpture demeure pour certains un art traditionnel, lié à une figuration réaliste qui connaît son plein développement de 1920 à 1940. À côté des recherches monumentales d'Antoine Bourdelle (Héraclès archer, 1909), Aristide Maillol consacre son existence à la glorification du corps féminin, qui lui permet des effets de masse et d'équilibre plastique dans la tradition de la sculpture antique.

Du cubisme aux ready-made

À partir de 1907 se développent cependant des tentatives nouvelles de figurer les objets. Braque et Picasso inaugurent la sculpture cubiste, dont un des plus importants représentants sera Alexander Archipenko. Ossip Zadkine abandonne ce système trop strict pour recréer un style personnel lyrique. C'est aussi un mode personnel de figuration que crée Henry Moore, un des fondateurs du renouveau de la sculpture anglaise. L’œuvre baptisée le Roi et la Reine (1952-1953) montre comment il s'attache au corps humain, en le réduisant à des éléments géométriques. Son style évoluera vers la monumentalité et le jeu des creux et des vides (Hill Arches, 1973).

Dans le même temps, Constantin Brancusi retrouve la taille directe de la pierre en créant le Baiser (1908) et invente des formes synthétiques liées à une quête métaphysique personnelle. Sa Muse endormie (1909-1910), au visage à peine suggéré, est un exemplaire d'une série dans laquelle le sculpteur, partant d'une figuration traditionnelle, tend à des formes abstraites.

La sculpture abstraite est le domaine de prédilection de Hans Arp. Sa Concrétion humaine (1933), aux formes ondulées, est à la fois totalement abstraite et puissamment chargée de sensualité.

Enfin, Marcel Duchamp invente l'objet-sculpture, comme la Roue de bicyclette (1913) : l'artiste ne crée plus, mais il prend un objet réel tout prêt (il l'appelle un « ready-made ») et le transforme arbitrairement en un objet artistique, par un acte de nature magique.

Nouveaux horizons, nouveaux matériaux

Sculpteurs, peintres, architectes et écrivains s'interrogent et théorisent sur leur rôle et sur la fonction de leur art.

Le futuriste Umberto Boccioni crée avec Formes uniques dans la continuité de l'espace (1913) une œuvre dans laquelle c’est le bronze lui-même, et non plus une forme humaine, qui semble en marche.

Le constructiviste russe Vladimir Tatline réalise en 1919-1920 la maquette du Monument à la IIIe Internationale, spirale ascendante au sein de laquelle son auteur prévoit de suspendre à des câbles d'acier une pyramide et un cube tournant, aménagés en bureaux.

Avec les frères Antoine Pevsner et Naum Gabo, la sculpture découvre des matériaux modernes, comme le plastique et le fil de nylon (Construction linéaire n° 2, 1949-1953, Gabo). Les formes géométriques qu'invente Gabo correspondent à la fascination pour la science qui hante de nombreux artistes contemporains.

Une autre tendance de la sculpture du xxe s. est liée au trompe-l'œil, avec des recherches propres au pop art, comme les figures de George Segal qui se mêlent à des objets réels. Dans la Fenêtre du restaurant (1967), l'illusion réaliste vise à présenter une image ironique de notre société. Dans ce même esprit de contestation de notre monde, César utilisant des matériaux de récupération, invente des images de notre temps, comme ses Compressions, faites de tôles de voitures pliées. Quand à Jean Tinguely, bricoleur de génie, il récupère lui aussi des objets quotidiens, généralement métalliques, et les transforme en assemblages qu'un moteur anime. Une poésie nouvelle naît des groupements hétéroclites qu'il crée. Grâce à lui, et aux artistes inventifs de notre temps, la sculpture demeure une aventure spirituelle.

Qu'est-ce que la sculpture moderne ?

De nos jours l'exploration de la troisième dimension continue à jouer dans la création plastique un rôle capital. La vitalité de la sculpture actuelle se manifeste dans trois directions.

Il existe toujours des sculpteurs au sens traditionnel du mot, qui créent des œuvres figuratives ou abstraites selon des techniques ancestrales ou nouvelles. Le bois – dont Étienne-Martin a tiré ses Demeures – et la pierre continuent d'être travaillés, mais le fer et les différents matériaux plastiques permettent de nouvelles créations. Les compressions ou les expansions de César ont valu la notoriété à leur auteur, et l'urbanisme contemporain concède une place réelle à la sculpture : en témoignent les mobiles et les stabiles géants d'Alexander Calder qui ornent les espaces urbains de Manhattan ou de la Défense, ou encore, près du Centre Georges-Pompidou, la joyeuse fontaine Stravinski (1983), de Tinguely et Niki de Saint-Phalle.

La sculpture a vu aussi ses frontières se déplacer. Elle a envahi la peinture, et le xxe s. a connu un grand nombre d'œuvres intermédiaires entre ces deux arts. Dès 1912, Picasso présente une Guitare, construction de carton découpé, papier collé, toile, ficelle, huile et traits de crayon. Ce bas-relief, profond de près de 10 cm, se lit comme une peinture en profondeur plutôt que comme une sculpture au sens traditionnel du terme. Dans le même esprit s'illustrent des artistes aussi différents que le constructiviste Tatline ou Jean Arp, l'un des fondateurs du mouvement dada.

Enfin, la sculpture a connu un développement considérable, lié à l'« art environnemental ». Elle est devenue un art de l'espace, parfois gigantesque, et a investi des lieux immenses : lorsque Christo emballe le Pont-Neuf, à Paris, sous des centaines de mètres carrés de toile, il crée, avec des techniques nouvelles, ce que l'on appelle « installation » ou « environnement », et qui est, tout compte fait, une sculpture éphémère.